Coup de gueule
Ca m'apprendra, aussi, à ne pas me tenir au courant. Hier, je butinais çà et là, en quête de liens à proposer à mes blog-brothers and -sisters in jazz, quand je suis tombée par hasard sur le site des labels Futura et Marge. Bon, maintenant, je ne peux pas dire que j'ai été surprise de voir qu'«on» avait encore fait des misères à Gérard et Odile Terrones.
Gérard n'est pas consensuel ; Gérard est, depuis quarante ans, férocement indépendant ; Gérard produit les musiciens qu'il aime, et tant pis si les autres ne sont pas contents. Gérard dérange... alors, forcément, il faut lui mettre des bâtons dans les roues...
Oui, mais : Gérard est intègre et passionné. Là où d'autres auraient laissé tomber depuis longtemps, lui continue. Et pourvu qu'il continue très longtemps...
Avant de vous envoyer sur le site des disques Futura et Marge, rubrique «Opinions» (mais il n'est pas interdit de loucher sur le catalogue...), je vous raconte le début de l'histoire.
Tout commence en novembre 1981, quand le Hilton Ruiz Trio enregistre au «Jazz Unité», un club créé et dirigé par Gérard... lequel est, à l'époque, le manager exclusif d'Hilton Ruiz. Un double LP sort en 1984, pressé à 1.000 exemplaires. En 2001, Gérard sort une réédition CD du premier volume du concert. Tirage : 400 exemplaires.
Et voilà t'y pas que le photographe qui avait pris les clichés qui illustrèrent le LP demande le paiement de ses photos, tant pour la réédition que pour l'édition originale - prétendant que la facture ne lui a jamais été réglée... Gérard répond qu'il lui semble illogique de le rémunérer, lui, tandis que ni le créateur de l'évènement (lui-même), ni les artistes ne toucheront un centime.
Le faquin saisit la justice. Les motifs d'accusation : contrefaçon, atteinte au droit patrimonial et, tenez-vous bien, atteinte au droit moral (les photos ont été légèrement recadrées pour l'édition CD !...). Les indemnités demandées s'élèvent à (... tenez-vous mieux...) € 93.500 ! Pour un tirage de, je vous le rappelle, 400 CDs...
Peu après, Gérard retrouve la facture dans ses papiers. Le faquin a bien été payé, voyez-vous, bien avant la parution du LP... Sur sa lancée, notre Gérard se fend d'un article bien senti, que vous trouverez à la rubrique «Opinions».
Oh, mais c'est qu'il est vexé, Monsieur le Photographe ! Arrivé au tribunal en novembre 2004, le voilà qui demande, en plus de la somme sus-citée, € 15.000 pour «actes de dénigrement».
Faites le total : on arrive à € 108.500... pour un tirage de... oui, c'est bien ; vous suivez.
Au final, Gérard n'a payé que € 5.800. N'empêche : ça fait toujours € 5.800 de trop...
Et une certaine partie du petit monde du jazz qui, parfois, n'est pas si pourri que ça (parce qu'il ne faut pas croire que là-dedans, c'est tout le monde il est beau tout le monde il est gentil ; un vrai panier de crabes, croyez-moi...), s'est donné rendez-vous au «Sunset/Sunside» le 19 septembre 2005 pour un concert de soutien à Gérard et Odile. Quelques noms ? Alain Jean-Marie ; Alain Mion ; Andy Emler ; Bernard Vitet ; Bertrand Renaudin ; Boulou et Elios Ferré ; Claude Tchamitchian ; David Murray ; Francis Marmande ; François Méchali ; Hal Singer ; Patrice Caratini ; Riccardo Del Fra ; Ricky Ford ; Steve McCraven...
Et moi, je vous le dis : Gérard, ça a dû lui faire chaud au coeur.