Preaching blues

Publié le par Lady D.

   Tirée du «Bass Line» de Milt Hinton (l'un de mes bouquins préférés, sur lequel il faudra que je revienne un de ces jours), l'anecdote suivante :

   «Certains de mes plus inoubliables voyages à l'étranger, je les ai faits avec Pearl Bailey. Nous nous étions rencontrés au temps où elle chantait avec l'orchestre de Cab Calloway. En fait, son frère Bill était danseur dans l'une des revues. Il était bourré de talent, presque du même niveau que Bill Robinson. C'était un bel homme qui avait toujours une femme à chaque bras. Dans sa jeunesse, il ne menait pas une vie très rangée, il était incontrôlable.
    J'ai retrouvé Bill une vingtaine d'années après notre séjour chez Cab. Il avait arrêté de danser pour devenir prêcheur itinérant.
    Je rentrais à la maison en bus un soir quand j'ai vu une affiche qui annonçait un rassemblement religieux, avec le Révérend Bill Bailey comme invité exceptionnel. J'ai reconnu Bill sur la photo qu'il y avait sur l'affiche, et quand je suis rentré, j'en ai parlé à Mona. Bien sûr, elle savait aussi comment se comportait Bill au bon vieux temps et, pour cette seule raison, nous avons décidé d'aller le voir pour lui apporter notre soutien.
   Nous sommes arrivés tôt et nous sommes assis au second rang. Au bout d'un moment, l'endroit a commencé à se remplir. Plusieurs autres prêcheurs ont fait leur sermon et enfin, Bill est arrivé sur scène. Il a commencé lentement, pesant chacun de ses mots, mais au bout d'une vingtaine de minutes il s'est mis à parler de plus en plus vite, en haussant le ton. Et, soudain, il a commencé à se servir de ses pieds. D'abord, il faisait un petit pas de temps en temps, pour mettre l'accent sur un mot, mais au bout d'un moment, il prêchait la bonne parole en hurlant et en frappant du pied en même temps. Il s'est tourné d'un côté de la scène et a lancé : «Si vous...», il a frappé du pied, s'est retourné et a crié : «ne changez pas...», il a frappé du pied à nouveau, fait demi-tour et hurlé : «Vous irez tout droit en enfer !» Et il a sauté à pieds joints pour souligner le dernier mot. Le public était hypnotisé.
    Nous étions assis au milieu du second rang, mais nos regards n'avaient pas encore croisé celui de Bill. Et c'est pourquoi j'ai été proprement abasourdi de l'entendre terminer par ces mots :
    «Je me compare à Paul. C'était l'un des plus grands pécheurs. Oui, Paul était un pécheur. Et j'étais tout comme lui. Mais Paul a changé, et moi aussi. Je faisais toutes les bêtises auxquelles on peut penser. Je buvais du whisky, je fumais des joints, je prenais des cachets et d'autres sortes de drogues. J'allais avec les prostituées et je buvais du whisky tous les soirs.»
   Et là il s'est interrompu, a regardé le public, pointé le doigt vers moi et crié : «C'est bien ce qu'on faisait, pas vrai, Milton ?»
   Mona et moi nous sommes levés en vitesse, nous avons mis deux dollars dans l'un des plateaux et nous nous sommes éclipsés vite fait.»

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P
oui viens me voir lundi...
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L
Hier j'ai acheté un Goal et un Astro et j'ai rien gagné, je te signale...
C
impressionant! je vois "le film"bonsoir lady!
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L
Moi aussi je le vois !!!
P
marrant ton message chez cactusJo... décidemment...
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L
<br /> Pitié... je suis surmenée... ah, faut que j'aille voir chez toi, ou quoi ?Bon... que j'attende un peu, peut-être ???
P
Héhé au moins on s'ennuit pas à la messe mà bas ... reamarque ma dernière visite à un curée ne l'a pas été non plus puisque j'ai du empêcher ma femme de le frapper toute l'entrevue à cause de ce qu'il lui disait... 
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L
Moi, j'ai le souvenir d'un qui n'arrivait pas à faire démarrer son électrophone et qui chantait horriblement faux. Quasi fou rire en plein enterrement...Il me semble bien que ce Bill Bailey là est celui du morceau, tiens.